Compte-rendu de soutenance de
Mémoire de mastère de recherche en
didactique de l’histoire
Sujet : Pratiques enseignantes
& Apprentissage
de la démarche historienne chez les
lycéens en Tunisie
Etudiant :
Fadhel JEBABLI
Directeur de recherche : Pr. Mokhtar AYACHI
Lieu : Institut Supérieur de l’Education et de la
Formation Continue – Université Virtuelle, le Bardo, Tunis
Date : Jeudi 2 mars 2017
Mention : Très Bien (17/20)
Il s’agit, dans ce travail (de 186 p),
de Fadhel Jebabli, de l’analyse
du processus enseignement/apprentissage centré
sur la question de la démarche
historienne c'est-à-dire
sur la posture enseignante concernant le rapport au savoir historique (chez les lycéens tunisiens).
Ce travail a pour cadre la réforme
éducative de 2002, plus connue sous l’appellation de « loi
d’orientation du 23 juillet 2002 ». Les programmes et Instructions
Officielles, concernant la matière histoire, impulsent une orientation de
l’enseignement qualifiée d’« innovation » et « d’évolution »,
au niveau du second degré.
Dans ces documents officiels, les
enseignants sont appelés à établir un nouveau rapport au savoir historique et à
appliquer des méthodes actives, notamment socio constructivistes en classe en insistant
sur la démarche historienne,
qui consiste à visiter
l’histoire du côté de l’épistémologie en
la considérant en tant que
science de l’homme vivant en société.
Le raisonnement
historique devient une
compétence essentielle ciblée par l’enseignement/apprentissage de cette
matière. L’objectif est de former le citoyen éclairé disposant d’un esprit
critique conscient de ses devoirs et de ses droits et non le sujet passif
(manipulable, dépourvu d’esprit critique)…
Il s’agit ici pour le candidat d’analyser l’écart entre les
intentions officielles, dans les programmes et autres Instructions Officielles,
et l’opération d’enseignement/apprentissage en focalisant sur le pôle enseignant.
Le paradigme choisi ici est « la démarche historienne » dans
l’enseignement de second degré. Elle constitue la méthode privilégiée pour
appréhender le savoir historique en le problématisant.
La justification du choix de la
thématique de la recherche est largement commentée par le candidat. Il s’agit de l’enseignement/apprentissage
de l’histoire en tant que discipline scientifique et non en tant qu’ensemble de
savoirs narratifs dépourvus d’esprit critique qu’il s’agit d’inculquer. Autrement dit, la démarche historienne motive
l’élève et donne du sens au cours d’histoire, compétence
sur laquelle insistent, d’ailleurs, Les Instructions Officielles.
Mais, la carence du raisonnement
historique dans
l’enseignement du second degré est une constatation faite par le candidat
durant ses années d’exercice du métier d’enseignant. Les élèves, pour leur
part, manifestent un certain rejet de la matière historique considérée comme
« difficile » et « inutile ». Un rapport négatif avec cette discipline commence même
par forger des stéréotypes
préjudiciables pour la discipline. Mais, comment remédier à cette posture
négative des élèves, usant de plus en plus de la pratique de « fausses
copies » durant les évaluations des acquisitions de
connaissances ?
Ce rapport au savoir historique, du côté des élèves, est dicté aussi ou
déterminé par le rapport de leurs enseignants, avec la matière enseignée,
considéré comme « passif »…
La problématique soulevée
concerne ici la contradiction entre l’esprit des programmes officiels et des
Instructions qui les accompagnent, notamment depuis 2006, et l’état de chose constaté en
classe d’histoire. La situation devient davantage critique si l’on sait
que l’étape de formation, au niveau du 2e cycle de l’enseignement du second
degré, est une étape cruciale préparant l’élève à la citoyenneté et à
l’enseignement supérieur… Tout cela constitue les mobiles scientifiques de cette
recherche.
Quant aux objectifs déclarés du travail, ils visent l’évaluation du profil des
enseignants d’histoire et leur conception de leur enseignement ou de leur
pratique en classe avec leurs élèves. Ces objectifs s’intéressent
également aux difficultés des élèves à acquérir un raisonnement historique.
Mais cette constatation a-t-elle un rapport avec les représentations qu’ont les
élèves de la discipline historique depuis l’enseignement primaire. Leur rapport au temps historique a-t-il changé ? Y a-t-il eu une
rupture, ou plutôt une continuité, dans les pratiques d’enseignement entre
l’école primaire et l’enseignement de second degré ?
Quant aux attentes déclarées de ce travail,
elles visent particulièrement à amener les enseignants d’histoire à revoir ou repenser leurs
pratiques en classe en
vue d’un rapport plus actif
au savoir historique, ce
qui ne peut qu’améliorer nécessairement la nature des acquis des élèves. Mais,
cela ne pourrait se faire sans l’approche didactique qui demeure insuffisamment connue chez
le corps enseignant, non formé, d’ailleurs, au métier de la gestion du savoir
en classe.
Les différentes constatations, déjà
énumérées, ont amené l’auteur de ce mémoire à formuler les trois hypothèses suivantes :
- la 1ère concerne le profil de formation des enseignants d’histoire,
- la seconde concerne la conception classique de l’histoire chez les enseignants,
matière plutôt considérée
comme appartenant au genre
littéraire,
- la troisième concerne les pratiques désuètes, en vigueur, qui ne conduisent pas les
élèves aux compétences
critiques de la démarche historienne, favorisant la formation à la
citoyenneté.
Un certain nombre de concepts opérateurs sont utilisés, dans cette démarche de
l’auteur, comme outils de recherche, tels que :
- la démarche
historienne
- le raisonnement
historique
- la sensibilité
historienne
- les pratiques enseignantes
- le rapport
au savoir, etc…
D’autres
outils, non moins importants, sont formés par les trois enquêtes menées auprès d’enseignants d’histoire
et d’élèves dans deux lycées différents : l’un situé à l’intérieur du pays
(au Kef), l’autre situé sur la côte (Bizerte). Un troisième questionnaire est
soumis aux Inspecteurs d’histoire-géographie, exerçant dans plusieurs régions
du pays.
L’originalité de ce travail
réside essentiellement dans la focalisation de sa problématique sur le pôle
enseignant ; et
c’est le 1er travail
en didactique de l’histoire, dans ce genre, mené à l’ISEFC.
Au niveau
méthodologique, le candidat a commencé son travail par une lecture critique de l’état des
lieux de la question
traitée (une sorte d’observation
clinique d’une thérapie),
focalisant sa démarche sur le paradigme
de la démarche historienne entre enseignement/apprentissage.
Cette approche de didactique
de la recherche évite de
tomber dans l’anachronisme des théories, sans rapport avec une réalité de
pratique d’enseignement à l’école tunisienne.
Ainsi
une première partie
consacrée au diagnostic ou
plutôt à la situation
problème, considérée
également comme une sorte d’observation clinique d’une thérapie, est
nécessaire en tant que fondement ou infrastructure de la recherche à partir de
laquelle le candidat mène son investigation.
La seconde
partie du travail est
consacrée à la visite des
résultats du savoir savant, aux
lectures de travaux
antérieurs en rapport
avec la thématique de la recherche et sa problématique.
Enfin, une troisième et dernière partie est réservée à la question empirique de la recherche permettant de vérifier la
validité des trois hypothèses émises au
départ.
* Quelle
est l’originalité des résultats obtenus, enfin ?
- un grand nombre de lycéens
n’ont pas acquis, sur les bancs scolaires, l’habileté à se situer dans le temps
et dans l’espace,
- limite des compétences
professionnelles des enseignant,s due à la carence de leur formation à
l’université (en épistémologie et en didactique de
l’histoire,)
- limite de la formation de formateurs (Inspecteurs) censés combler ces lacunes des cursus universitaires …
Cette
réalité exprime ainsi les raisons
de la persistance de l’enseignement traditionnel avec la médiocrité du rendement qui s’en suit, en l’absence de mesures
pédagogiques et didactiques touchant
profondément l’enseignement de la matière historique aux trois
niveaux suivant:
1. programme
scolaire, temps consacré à l’enseignement hebdomadaire
de cette discipline et coefficients accordés à cette matière pour la
sortir de la marginalité…
2. formation
des enseignants à l’université qui
demeure désuète.
3. formation
de formateurs en didactique, en
vue de corriger les lacunes du rapport au savoir, au niveau des enseignants…
D’ailleurs le candidat fournit un
certain nombre d’hypothèses en pages 146 et 147 permettant une mise à niveau de
l’enseignement/apprentissage de la discipline historique en tant que matière
scientifique. Ce qui améliorerait nécessairement le rendement du système
éducatif, pour lequel le contribuable n’arrête de consentir des sacrifices, et
apporterait des satisfactions aux attentes sociales qui s’expriment, de plus en
plus, en termes de besoins
d’une nouvelle
histoire critique alimentant
la gestation de société civile…
Mokhtar AYACHI
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