dimanche 28 mai 2017

Conférence présentée à l'Université de Genova le 27 avril 2017 sur la question de l'altérité méditerranéenne...



Università di Genova  -  Scula di Scienze sociali
Dottorato di ricerca « Migrazioni e processi interculturali »

Convegno
« Construire Comunità interculturali: le sfide nei contesti, sociali, educativi e sanitari »
 (Genova, 27 aprile 2017)
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L’altérité  méditerranéenne (occidentale) dans les cursus d’Histoire
 scolaire en Tunisie : une ambivalence didactique ?

Mokhtar AYACHI
Professeur à l’Université
de Tunis-La Manouba

Introduction
                                                                        
Dans sa préface à l’Orientalisme d’Edward Saïd, ouvrage paru en 1980, le philosophe français et historien des idées, d’origine bulgare, Tzvetan Todorov (1939-fév. 2017), soulignait que « L’histoire du discours sur l’autre est accablante. De tout temps les hommes ont cru qu’ils étaient mieux que leurs voisins. Cette dépréciation a deux aspects complémentaires : d’une part, on considère son propre cadre de référence comme étant unique, ou tout au moins normal ; de l’autre, on constate que les autres, par rapport à ce cadre nous sont inférieurs. On peint donc le portrait de l’autre en projetant sur lui nos propres faiblesses ; il nous est à la fois semblable et inférieur. Ce qu’on lui a refusé avant tout, c’est d’être différent .... »

  Fondées sur une différenciation marquée entre l’ « identité spatiale »[1] et l’ « altérité spatiale», les disciplines sociales et humaines, dispensées dans l’enseignement du second degré en Tunisie, intègrent le « rapport à l’autre » (avec les valeurs communes ou en partage) à travers les représentations variées des espaces culturels.

Dans ce sens, l’Europe occidentale, méditerranéenne notamment, occupe une importance considérable dans les programmes et manuels d’histoire où l’approche chronologique et thématique embrasse une histoire non seulement régionale mais quasi mondiale. Les deux rives de cet espace commun, lié aux choix identitaires nationaux, sont saisies dans une perspective longue d'accumulations, d'échanges et d'interaction avec le monde en général et avec l’aire arabo-musulmane en particulier.

I -  L’occident méditerranéen en histoire scolaire au collège et au lycée

Au niveau quantitatif, l’analyse des manuels d’histoire des différents niveaux d’enseignement, montre qu’environ la moitié des leçons est réservée à l’espace occidental de la méditerranée. Celui-ci embrasse, temporellement, toutes les époques : de l’antiquité jusqu’au 20ème siècle. Cet intérêt particulier pour l’altérité européenne méditerranéenne est tout à fait légitime, eu égard au rapport à un espace géopolitique et culturel marquant profondément l’histoire de cette région civilisationnelle.
  
Au niveau des contenus, l’espace géo historique et géopolitique de l’Europe occidentale retenu par les programmes, englobe, en général, les pays de l’Europe occidentale ainsi que les pays de la rive nord méditerranéenne. En revanche, la présence d'autres pays européens, notamment ceux de l’Est, reste fort timide.

D’une façon générale, programmes et manuels accordent une priorité à l’étude des civilisations et des sociétés européennes dans leurs espaces. La démarche adoptée est un cadrage politique préliminaire débouchant sur l'étude des aspects économiques, sociaux et culturels et sur les rapports avec la rive sud de la méditerranée.

L’aire européenne se taille une place importante à travers les pages des manuels scolaires: Plus de la moitié des programmes scolaires d’histoire (au collège et au lycée[2]) est réservée à des questions touchant l’altérité. Cette part s'élève même à près des 2/3 pour la 3ème année secondaire et aux 3/4 pour la dernière année du collège.

Ce choix s’explique par l’importance des rapports historiques existant entre ces entités politiques et les pays arabo-musulmans, notamment maghrébins. De tels rapports ont d’ailleurs marqué profondément toute l’histoire du bassin méditerranéen.

Sur le plan chronologique, les programmes traitent de l’histoire européenne, depuis l’antiquité jusqu’aux temps modernes et contemporains. Pour chaque période, des événements politiques et certaines crises et mutations économiques et sociales majeures, sont privilégiés.

C’est la période moderne et contemporaine (entre le 16ème et le 20ème siècle) qui est la plus développée et la mieux étayée à travers quelques questions incontournables, telles que la Renaissance, les Lumières, la Révolution française, la Révolution industrielle, l'Expansion coloniale, etc…

 Il s’agit, précisément, de tout l’héritage des Lumières et de la Modernité influençant l’élite qui a édifié la Tunisie indépendante et inspirant l’essentiel de ses choix politiques et sociétaux.

Pour la période classique (médiévale), l'étude se focalise essentiellement sur le Maghreb musulman et ses dimensions spatiales et identitaires.

    II - Mouvements de voyageurs, mouvements d’idées, mouvements de commerce

Au niveau de la nature de ces rapports rive-sud/rive-nord de la Méditerranée, les contenus n’ont pas manqué d’alterner échanges et conflits :

-  Au registre des échanges :

        Tout en s’arrêtant sur les moments de rivalités qui ont jalonné l’histoire politique méditerranéenne, l’histoire scolaire n’a pas manqué d’insister sur les échanges commerciaux et le dialogue civilisationnel entre les deux rives de la Méditerranée à travers l’histoire : Carthage est mise en exergue en tant que puissance commerciale méditerranéenne. Il y a aussi la Tunisie à l’époque romaine, les influences de la civilisation arabo-musulmane sur l’Occident chrétien,

C'est dans ce cadre, précisément que nous constatons une mise en valeur de l’apport de la civilisation arabo-musulmane et de sa contribution à la Renaissance européenne, fait historique, longtemps occulté en Europe.

 Ibn Rushd (Averroès), par exemple, représente l'une de ces figures emblématiques de cette contribution à la Renaissance intellectuelle européenne. Ses travaux faisant autorité, à l’époque, étaient fortement prisés dans les universités occidentales jusqu’au 17 ème siècle.

Cette influence arabo-musulmane se fait aussi sentir sur le plan linguistique, car les langues européennes ont emprunté beaucoup de mots au lexique arabe. Le manuel de 8ème année (avant dernière du collège) illustre cet échange fructueux à travers un tableau récapitulatif des mots d'origine arabe fréquemment utilisés dans les langues européennes.

 C'est le cas des mots; Chèque, Magasin, Douane (en français), Acequia, Noria, Azud (en espagnol), Centaro, Rotolo, Caffisu (en italien), Vissel (en allemand)[3], etc…  Ces exemples montrent clairement une volonté d’affirmation de soi, conformément aux Instructions officielles qui insistent sur la fierté de l’héritage arabo-musulman et de l’appartenance à son aire civilisationnelle

    
 Il en ressort une présentation des cursus qui privilégie deux dimensions fondamentales : la forte interaction entre le politique et le culturel dans l'appréhension de l'évolution historique des sociétés et l'importance des échanges divers entre les différentes civilisations des deux rives du bassin méditerranéen.
         
     Au niveau des référentiels historiques de la construction politique européenne, les grands personnages politiques et les grandes figures scientifiques qui ont marqué le cours de l’histoire de l’Europe, sont mis en exergue dans les textes et l’iconographie des manuels, notamment les artisans de la démocratie athénienne (Solon, Clisthène, Périclès), les philosophes des Lumières (Montesquieu, Rousseau, Voltaire, Diderot).

L’Europe est appréhendée, surtout à l’époque moderne et contemporaine, comme une référence pour la modernité (valeurs de citoyenneté et de liberté) et un modèle civilisationnel au niveau des choix sociétaux à venir, en opposition à d'autres modèles géopolitiques nationalistes ou ultranationalistes. 

- Au registre des conflits historiques :

          Certains événements majeurs, marquant l’histoire de la Méditerranée depuis l’Antiquité, sont mis en relief, mais toujours dans une approche se voulant historique et dépassionnée, tels que :

- les guerres puniques entre Rome et Carthage,
- la confrontation entre le monde arabo-musulman et l'Europe chrétienne au Moyen-âge, pendant les croisades, la Reconquista…
-  le confit entre l’Espagne catholique et l’Empire ottoman en Méditerranée,
-  l’expansion coloniale à partir du  19ème siècle,
- la Grande Guerre, la crise des années trente, la montée du fascisme, la deuxième Guerre mondiale, la Guerre froide, la  décolonisation, etc…

          L’altérité est appréhendée ici dans les contextes historiques d’époque mettant en rapport des intérêts antagonistes prenant des dimensions expansionnistes parfois religieux, parfois économiques, parfois stratégiques. Cependant, ces cursus d’histoire insistent, même lorsqu’il s’agit des croisades et de leurs lectures en tant que phénomène historique dépassionné, sur le « rapport à l’autre » des deux côtés, en tant qu’apports ou « gains » en termes culturels et techniques.

          Même l’expansion coloniale, elle est saisie, en tant que phénomène historique,  à travers une approche critique d’une rencontre souvent violente, certes, mais exprimant également l’habileté du mouvement de libération nationale qui a su exploiter les contradictions internes du fait colonial français lui-même. En effet, celles-ci sont bien visibles en réalité dans les contenus scolaires, qui charrient des valeurs modernistes antinomiques avec la réalité coloniale. Ces valeurs libérales, imprégnant les élites tunisiennes, ont bien servi d’ailleurs, à travers plusieurs étapes des 75 années de domination, la construction du projet national de libération ainsi qu’à la confection du projet de société de la Tunisie indépendante.
   
Conclusion

     Marqué par une forte neutralité scientifique, le savoir historique proposé dans les cursus scolaires encadre et distille rigoureusement les représentations sur l’Europe méditerranéenne et contrôle, par les comparaisons et le croisement des points de vue, des stéréotypes qui peuvent y apparaître. L’image de l’Européen incarne encore dans les diverses représentations des élèves des paradoxes : modernisme, liberté mais oppression coloniale, voire racisme à la fois.  

      Pourtant, l’européen, acteur individuel, historique ou social, n’apparaît que rarement en tant que tel dans ces cursus. Les concepteurs des manuels tiennent à l’attitude d'impartialité, tout en se focalisant sur les grandes dynamiques de changements économiques et sociaux qui ont marqué le monde, dont l'Europe méditerranéenne occidentale est partie prenante.

En somme, les manuels scolaires tunisiens, objet du corpus historique étudié, valorisent une image complexe, voire ambivalente de l'Europe et de l'européen méditerranéen, mettant en présence deux entités : l’identité et l’altérité dans un contexte d’échanges et de conflits (de voisinage), aboutissant toutefois à un fond commun civilisationnel et humaniste en partage.

Enfin, malgré l’ouverture de l’enseignement de l’histoire, sous les auspices des Nations-Unies, après le second conflit mondial, sur sa troisième fonction épistémologique, représentée par les valeurs universelles et la science en partage entre l’identité et l’altérité, les stéréotypes concernant l’autre sont encore vivaces dans les cursus scolaires, notamment en Occident.

Cependant, la tendance aux replis identitaires, enregistrée depuis ces dernières décennies au sud de la Méditerranée, conséquences de l’incompréhension et du développement des sentiments xénophobes, commence à affecter le rapport à l’altérité du côté des deux rives. Mais est-il du devoir des sciences humaines et sociales de contribuer largement à impulser davantage les débats sur l’interculturalité pour une reconnaissance mutuelle de l’humain dans sa diversité, gage de paix sociale et de valeurs citoyennes.

Par ailleurs, l’assimilation des identités culturelles, produit de courants migratoires contemporains provenant du sud de la méditerranée, représente-t-elle pour les pays riverains du nord, l’antidote aux dangers de formation, sur leur sol, de phénomènes de communautarismes ? Le projet de construction de communautés interculturelles, nécessite-t-il un travail sur l’évolution des représentations de ou des altérités ? En effet, celles-ci devenant, de fait, une composante de l’identité (nationale) collective, contribuent ainsi à l’enrichissement du fond culturel commun. Les défis culturels, pour la réalisation de tel projet d’intégration, passent nécessairement par l’éducation (ou la rééducation) à tous les niveaux de la vie quotidienne, impliquant d’abord le « vivre-ensemble ». Les mutations culturelles, y compris celles des mentalités, est une opération générationnelle qui se réalise dans la durée.


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Annexes :

Annexe 1
Programme d’Histoire en 8ème année (de l’enseignement de Base)
(2ème année collège)
Chapitres
Contenus
Observations
Horaires
Le monde arabo- musulman du 10e au 16e siècle
-Tentatives d’unification du Maghreb et de l’Andalousie
- Ifriqiya à l’époque Hafside
- les influences de la civilisation arabomusulmane sur l’Occident chrétien

- insister sur la tentative des Almohades
- Histoire politique et civilisation
- Rôle du commerce et des croisades
- Influences scientifiques et culturelles
7 à 9 Heurs
L’Europe occidentale : de la Renaissance à la Révolution industrielle
- la Renaissance européenne 
- le Révolution française
- la Révolution industrielle
- les facteurs de la Renaissance y compris les grandes découvertes
-Humanisme et renaissance artistique
- Les causes, en insistant sur la philosophie des Lumières
- Les conséquences : chute de l’Ancien régime et déclaration des droits de l’homme et du citoyen
- Progrès technique et scientifique et révolution des transports
- conséquences économiques et sociales 
5 à 7 Heurs
La Tunisie : de l’époque ottomane à  l’établissement du Protectorat français
- Evolution politique de la Régence de Tunis du 16e siècle jusqu’à la fin du 18 siècle
- la Tunisie  au 19e siècle
- L’établissement du protectorat français en Tunisie
- Evolution politique
- la Tunisie à l’époque de Hamouda Pacha (Husseinite)
- Les crises du 19 siècle
- le mouvement réformiste
- les expéditions militaires
- le traité du Bardo et la Convention de la Marsa
- Les premières réactions contre l’occupation


Annexe 2
Programme d’Histoire en 3e année secondaire : « Les mutations du monde moderne et contemporain »
(avant dernière année du lycée)
Chapitres
Contenues
Observations
Horaire
L’Europe et le monde méditerranéen au 16e siècle
- la Renaissance européenne
- les grandes découvertes géographiques et leurs conséquences.
- les manifestations de la Renaissance (étude d’un personnage ou d’un œuvre)
8 à 10 heures
- l’Empire Ottoman
- Crise de la dynastie Hafside et conflit hispanico- Turque en Méditerranée
- Expansion et organisation de l’empire
- Manifestation de la crise
- Conflit hispanico- turque et établissement des Ottomans en Tunisie
Les Mutations du monde occidentale au 17e et 18e siècle
- les mutations économiques de l’Europe occidentale : l’exemple anglais
- le mercantilisme et les prémices de la révolution industrielle
6 à 8 heures
Les Lumières
- Philosophie des Lumières (étude d’une œuvre, exemple : l’Encyclopédie)
- La Révolution française
- Causes et conséquences
L’Empire  Ottoman et le Maghreb arabe au 18e siècle
- le crise de l’Empire Ottoman au 18e siècle
- Crises et premières tentatives de réformes 
6 à 8 heures
-Evolution politique des pays du Maghreb au 18e siècle
- Evolution politique au 18e siècle
- la dynastie Husseinite au 18e siècle : pouvoir et société  
La révolution industrielle et l’assise d’une économie capitaliste au 19e siècle
- Révolution industrielle et ses conséquences
- la révolution industrielle
- les mutations économiques et sociales
- les nouveaux courants politiques et intellectuelles
6 à 8 heures
- l’expansion coloniale et le partage du monde
- rivalités entre puissances coloniales
- carte du partage du monde
Renaissance arabe et évolution de la Tunisie au 19e siècle
- Renaissance arabe moderne
-Origines et aspects de la Renaissance
6 à 8 heures
- Evolution de la Tunisie au 19 siècle
- Crises et tentatives de réformes
- Etablissement du Protectorat français et réactions nationales jusqu’en  1914

Sources :
1-       Sources Bibliographiques :
Audigier François, « Histoire de stéréotypes, stéréotypes sans histoire » Paris : « Le cartable de Clio », n°5 2005, pp.  67-77.
Ayachi Mokhtar, (s. direction), Circulation des savoirs et institutions d’enseignement dans l’espace arabo-méditerranéen, Tunis : Faculté des Lettres, des Arts et des Humanités, 2017, 463 p.
Béji Hélé, « La Pédagogie des lumières ou la réforme du système éducatif tunisien » in Kodmani-Darwish B. et Chartouni-Dubarry M. Les Etats arabes face à la contestation islamiste, Paris : Armand Colin, 1997,  pp.255-269.
Braudel, F. : Grammaire des civilisations, Paris : Flammarion, 1993, 625 p.
Choppin, A. 1992 : Les manuels scolaires : histoire et actualité,  Paris : Hachette, 1992, 224p.
Chupin, J. , « L’Orient  à l’Ouest dans les manuels scolaires » Paris : « Le Monde de l’éducation », septembre, 2004, 54-55.
Collectif d’auteurs, Les Communautés méditerranéennes de Tunisie, Hommage au Doyen Mohamed Hédi Cherif, Tunis, CPU, 2006, 508 p.
Frank R., « Qu’est-ce qu’un stéréotype ? », in J.N. Jeanneney (dir), Une idée fausse et un fait vrai : les stéréotypes nationaux en Europe, Paris : Odile Jacob, 2000, pp. 17-26
Gautschi, P. & Biennenkade, A. « Les fonctions des images dans le manuel d’histoire », Paris : Le cartable de Clio, 6, 212-225.
Nasr, M.  Les Arabes et l’Islam, vus par les manuels scolaires français,  Paris : Karthala ; Hamra-Beyrouth : Center for Arab Unity Studies, 2001
Nese, I. l’Islam dans les manuels scolaires allemands : exemples tirés de la géographie et de l’histoire. Perspectives, 128 (Dossier « Éducation, une passerelle pour le dialogue euro-arabe ? »), 2003
Todorov T.,  Nous et les autres, Paris : Seuil, 1989, 452 p

2-       Sources en ligne (Wébographie)
Achmaoui, F. (s.d.). « L’image de l’autre dans les manuels d’histoire de certains pays méditerranéens (Espagne, France, Grèce, Égypte, Jordanie, Liban et Tunisie »   in http : //www.isesco.org.ma/Islam.Today/FR/13/P6.html.
Bouayed, A. (2004). « Le monde arabe : mots et images dans les manuels scolaires de la France laïque » in http://www.islamlaicite.org/article202.html).
Blanc, A. Images de l’Autre dans les manuels scolaires d’Histoire et de Géographie des années 1950 au début des années 1980 - Vision d’une génération ? , N° 04. Institutionnalisation de la xénophobie en France, mai 2008, Revue Asylon(s), in http://www.reseau-terra.eu/article746.html)

   3- Liste des manuels scolaires utilisés (dont la langue véhiculaire est l’arabe) :

- Manuel des matières sociales (Histoire, Géographie, Education civique), 7 ème année de l’enseignement de base, Tunis, CNP, 2005.
- Manuel des matières sociales (Histoire, Géographie, Education civique), 8 ème   année de l’enseignement de base, Tunis, CNP, 2006.
- Manuel des matières sociales (Histoire, Géographie, Education civique),   9 ème année de l’enseignement de base, Tunis, CNP, 2007.
- Manuel d’Histoire, 1 ème  année Secondaire, Tunis, CNP, 2003.
- Manuel d’Histoire, 2 ème  année Secondaire, (Lettres et Economie), Tunis, CNP, 2005.
- Manuel d’Histoire, 2 ème  année Secondaire, (Sciences et Technologie), Tunis, CNP, 2005.
- Manuel d’Histoire, 3ème  année Secondaire, (Lettres et Economie), Tunis, CNP, 2006.
- Manuel d’Histoire, 3ème  année Secondaire, (Sciences et Technologie), Tunis, CNP, 2006.
- Manuel d’Histoire, 4ème  année Secondaire, (Lettres et Economie), Tunis, CNP, 2007.


[1] Les « espaces de l’identité » sont ceux qui traitent  de l’histoire et de  la géographie régionale et nationale de la Tunisie dans « son environnement culturel » indiqué par les programmes (le Maghreb, l’Orient arabe, le Monde arabe). 
[2] voir annexes
[3]Manuel d'histoire de la  8ème année (de l'enseignement de base), p. 35.

Résumé de la conférence



Università di Genova  -  Scula di Scienze sociali
Dottorato di ricerca « Migrazioni e processi interculturali »
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Convegno  « Construire Comunità interculturali: le sfide nei contesti, sociali, educativi e sanitari »
 (Genova, 27 aprile 2017
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L’altérité méditerranéenne (occidentale) dans les cursus d’Histoire scolaire en Tunisie :
une ambivalence didactique ?


Pr Mokhtar AYACHI
Université  de Tunis
Résumé

          Les phénomènes de mobilités humaines, de mouvements d’hommes  ou   d’immigrations  à travers l’espace constituent trois concepts, objets de nombreux travaux d’historiens, de géographes, de démographes, de sociologues et autres spécialistes en sciences humaines et sociales.

            Pour ce qui est de la région méditerranéenne au cours de la période contemporaine, les mouvements de voyageurs entre les deux rives ont débuté dès la veille de la période coloniale (au XIXème siècle) dans le sens Nord/Sud pour s’accélérer ensuite avec l’occupation. Cependant, après les indépendances nationales, les flux migratoires ont connu un renversement de sens (Sud/Nord) en s’accélérant, crescendo à l’occasion des crises sociales, économiques et politiques vécues par les pays du Sud de la Méditerranée.

            Ce brassage humain continu, qui en résulte entre les différentes civilisations des deux rives méditerranéennes, trouve, d’évidence, son échos dans les cursus scolaires tunisiens où les manuels, valorisent une image complexe, voire ambivalente de l'Europe et de l'européen. En effet, ces supports didactiques mettent en présence deux entités : l’identité et l’altérité, une rencontre fertile dans un contexte d’échanges divers et de conflits (de voisinage), aboutissant toutefois à la réalisation d’un fond commun civilisationnel et humaniste en partage.

Marqué par une forte impartialité scientifique, le savoir historique scolaire, proposé dans les cursus étudiés, distille rigoureusement des représentations souvent « positive » de l’Europe méditerranéenne et contrôle, par des comparaisons et des croisements de points de vue, des stéréotypes qui peuvent y apparaître. L’histoire de l’altérité méditerranéenne est envisagée dans une perspective longue d'accumulations, d'échanges dynamiques et d'interaction avec le monde en général et avec l'espace arabo-musulman en particulier.

Cependant, malgré l’ouverture de l’enseignement de l’histoire en Occident, sous les auspices des Nations-Unies, dès la fin du second conflit mondial, sur sa troisième fonction épistémologique, représentée par les valeurs universelles et la science en partage, résultant de la rencontre entre l’identité et l’altérité, les stéréotypes, concernant l’image de l’autre, notamment sud méditerranéen et subsaharien, demeurent vivaces dans les cursus scolaires. Avec le développement de nouveaux contextes issus de l’immigration Sud/Nord, cette situation va engendrer une problématique sociétale conduisant à la formation de communautarismes en marge de la société d’accueil.

Aussi, l’assimilation des identités de cette diaspora installée dans les pays riverains de Nord de la Méditerranée, conduirait nécessairement à la création d’une synthèse culturelle, évitant la superposition de phénomènes de mosaïque ou de melting-pot. Cependant, la formation de communautés interculturelles représente un réel projet de société plurielle mais qui nécessite avant tout un travail éducatif sur l’évolution des représentations de ou des altérités.

En effet, ces dernières, devenant de fait, une composante de l’identité (nationale) collective, contribuent ainsi à l’enrichissement du fond culturel commun. Mais il est vrai que la réalisation d’un tel projet de fédération ou d’intégration de communautés, génère de réels défis culturels passant nécessairement par l’éducation (ou la rééducation) à tous les niveaux de la vie quotidienne, impliquant d’abord le « vivre-ensemble ». Aller à la rencontre de l’autre devient donc plus qu’une opportunité, plutôt une nécessité dans un contexte régional, voire mondial de plus en plus hostile au respect des valeurs humanistes.


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